Disposant de quelques jours de congés, j’ai voulu me glisser dans la peau d’un député en réfléchissant à quelle proposition de loi j’aimerais porter pour défendre le pouvoir d’achat en Corse.
Il ne faut pas être un très grand économiste pour constater que La Corse est confrontée à une concentration excessive de certains marchés essentiels (carburants, GMS, déchets, transport maritime…).
D’ailleurs, le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF, 2018) et l’avis n° 20-A-11 de l’Autorité de la concurrence (2020) ont très bien documenté ce point.
Le problème avec ces concentrations de type oligopolistique, voire monopolistique, c’est qu’elles bloquent la formation des prix par le jeu de la libre concurrence.. Et certaines entreprises ne se privent pas de tirer le maximum de profit de ces situations, même dans la région la plus pauvre de France.
Les « gros » ont la fâcheuse tendance à la jouer solo et l’intérêt général est le bien le moindre de leurs soucis.
Or, certaines opérations de concentration en Corse échappent au contrôle de l’Autorité de la concurrence, non parce qu’elles sont anodines, mais parce que leur taille économique est inférieure aux seuils fixés par l’article L. 430-2 du code de commerce.
- Chiffre d’affaires cumulé total (monde entier) de l’ensemble des entreprises concernées :supérieur à 150 millions d’euros
- Chiffre d’affaires en France d’au moins deux des entreprises concernées :chacun supérieur à 50 millions d’euros
Même le régime dérogatoire prévu pour le commerce de détail (seuils abaissés à 75 M€ / 15 M€) reste trop élevé dans le contexte corse, où un supermarché peut verrouiller l’offre d’un bassin de vie entier sans franchir ces seuils.
L’Autorité de la concurrence et l’inspection générale des finances appuient la nécessité d’un ajustement des outils de régulation concurrentielle à l’échelle insulaire.
En d’autres termes, pour empêcher des concentrations nuisibles au pouvoir d’achat il faut abaisser le seuil de contrôle de l’Autorité de la Concurrence pour la Corse.
Est-ce possible ?
Absolument ! Le droit de la concurrence français autorise déjà des modulations géographiques du contrôle des concentrations.
Selon une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, le principe d’égalité devant la loi n’implique pas que des situations différentes soient traitées de manière identique.
Il est donc parfaitement conforme à la Constitution d’adapter la loi à des territoires qui présentent des contraintes économiques spécifiques, à condition que :
- la différence de traitement repose sur des critères objectifs ;
- elle réponde à un motif d’intérêt général.
Et donc ?
L’idée serait de porter un projet de loi abaissant ces seuils. Il conviendrait de les inscrire directement dans la loi, pour éviter toute dépendance vis-à-vis de l’instabilité gouvernementale actuelle, tout en laissant au gouvernement la possibilité de les affiner par décret en conseil d’Etat après avis de l’Autorité de la concurrence.
- Activités générales : CA total mondial > 20 M€ / CA France (2 parties) > 5 M€
- Commerce de détail : CA total mondial > 20 M€ / CA France dans le commerce de détail > 5 M€
Voici donc ce que donnerait cette proposition de loi, en toute simplicité. (voir photo)
Mais….je ne suis pas député…
En revanche, si l’un de nos 4 députés, voire les, souhaite s’en saisir, je la leur offre avec plaisir.
Elle est prête !
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